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Ramuntxo Garbisu - 04/11/2010 | eitb.com | 
L'enchainement des verrous protégeant l'achat des terres contaminées de Fertiladour ne peut relever d'une seule convergence "intellectuelle" avec l'industriel, comme détaillé ci-dessous

Fertiladour radioactividad Aquitania

Fertiladour a contaminé des services de l'Etat aux responsables aquitains du Port de Bayonne (EITB)

 

La contamination par de la monazite radioactive des terrains de l'ancienne usine Fertiladour (groupe Agriva) du port de Bayonne (entre 1973 et 1992) est, certes, un problème de santé publique et d'atteinte à l'environnement, mais ce dossier révèle également une stratégie occulte et concertée des services de l'Etat et de ceux, décentralisés, du Conseil Régional d'Aquitaine dans la zone portuaire basque.

Depuis la révélation sur la place publique de ce scandale par le CADE en 1997, tout aura été mis localement en oeuvre pour permettre à l'industriel d'échapper au principe du pollueur-payeur, pourtant voté le 25 juin 2009, et d'abuser ainsi la vigilance de l'exécutif aquitain.

Présent depuis le début jusqu'à aujourd'hui, Michel Amiel, de la DREAL (ex-DRIRE), en aura été l'élément clé : en place depuis 1983 (un record de présence pour un agent assermenté), soit au milieu des "années monazite", l'inspecteur chargé du contrôle du site a accepté de fermer les yeux sur la volonté préfectorale qui, à partir de 1998, avait clairement indiqué la procédure contraignante de dépollution des 7 hectares concernés.

Que cela soit dans l'abandon de la clause de surveillance de l'activité massique de la terre (fixée à 5 becquerel par gramme) à la gestion "maison" des 420 tonnes de terres les plus contaminées, Michel Amiel a laissé l'industriel piloter la phase de masquage de la pollution, lui laissant un délai de 10 ans au lieu des 4 mois exigés, ou acceptant de le voir ne plus mesurer la pollution radioactive de la nappe phréatique.

Le 29 mars 2010, Stéphane Gubert, Directeur de l'Unité des Etudes Infrastructures portuaires, entre en scène pour vider de son sens la contre-étude indépendante demandée et votée à l'unanimité par les élus aquitains le 25 juin 2009.

Dans son bureau, il rédige le cahier des charges contradictoire avec l'aide de Michel Amiel, mais également avec l'aide de l'industriel, "invité" à en accepter les termes, et à en suggérer l'oubli de certaines dispositions trop contraignantes.

Il élimine donc l'obligation de mesurer les principaux composants radioactifs dans l'eau (en particulier le Radon 226 et l'Actinium 228), puis proscrit l'analyse du sous-sol des terrains, que cela soit en carottages ou en mesure au contact du bouclier de graviers et scories pourtant disposés sur 25.000 m2 (soit le tiers du site).

Responsable du choix final du candidat retenu, il intervient ensuite pour écarter grossièrement la candidature redoutée du laboratoire de la CRII-RAD, privilégiant l'autre candidat, le laboratoire de l'ACRO, de Caen.

En mai 2010, c'est sous la responsabilité de Pascal Agostini, Chef du Développement et Exploitation du Port de Bayonne, que, "par précaution", disparait du vote prévu le 14 juin 2010 la clause suspensive des conclusions contradictoires.

Comme le précisent ses affectations, il prépare pour cela un texte à destination de la Commission permanente, où le mot "radioactivité" n'est pas cité une seule fois, où les trois arrêtés préfectoraux contraignants ne sont pas mentionnés, et où est produite une cartographie du terrain ne faisant apparaitre aucune pollution des sols.

La ficelle est un peu grosse, comme la rédaction d'eitb.com l'avait révélé, et le vote est reporté à septembre, dans une ambiance rendue électrique du fait de la communication orale en interne, fin juillet 2010, des premiers constats très alarmistes effectués par l'ACRO sur le site.

Présenter la pollution comme "des traces de radioactivités résiduelles" n'a aucun sens, quand 8 à 11.000 mètres cube de terres contaminées sont encore présentes sur le terrain, et que cela n'est un secret pour personne sur le Port depuis le rapport ANTEA de 1998.

Alors que, à la sortie de l'été, doit être remis au Président Alain Rousset un premier bilan d'étape par l'ACRO, c'est au tour de Daniel Province, le Directeur des Infrastructures Transports Durables de la Région, de rentrer en scène, pour discréditer l'ACRO et ses futures conclusions pressenties comme accablantes, par un courrier interne incitant à une "attitude pragmatique".

Le 1er septembre 2010, il signe une lettre de pur lobbying insistant sur le seul aspect économique du rachat des terrains de Fertiladour, mettant en garde le Président sur le risque que l'ACRO puisse "glisser vers une contre expertise de l'instruction menée par la DREAL".

"Est-ce mieux pour l'intérêt général ?", s'interroge-t-il, quand lui privilégie l'option de "conclure le plus rapidement possible" l'achat des terrains de Fertiladour par la Région.

Malgré cela, le 6 septembre 2010, le Président de Région prend connaissance d'une situation de contamination radioactive particulièrement contradictoire avec toute la "littérature" existante.

Il annule dans l'heure le principe de l'acquisition du terrain, loin, très loin même, de représenter "une opportunité économique" pour le développement industrialo-portuaire de la zone bayonnaise.

L'industriel se retrouve donc devant l'obligation de s'expliquer sur 10 ans de procédures insuffisantes qui justifieraient la notion de  "dépollution" du site, et voit s'éloigner le chèque de 6 millions d'euros, dont on espère qu'il n'était attendu que par la société Agriva Fertiladour.

Les premières voix outrées viendront du sous-Préfet des Pyrénées Atlantiques, qui, le 15 septembre 2010, dénonce une "polémique outrancière et inacceptable", puis du délégataire du Port, la CCI de Bayonne, qui, le 27 septembre 2010, par la voix de son Président Jean-Marie Berckmans, critique ouvertement "la mode des études indépendantes".

La divulgation à la presse, mercredi 3 novembre 2010, du rapport final de l'ACRO par les élus aquitains d'Europe-Ecologie fait sortir de sa réserve le conseiller régional socialiste de Bayonne, Matthieu Bergé, qui fustige le jour-même "la divulgation sans aucun contrôle d'informations, de nature non seulement à semer le trouble dans l'opinion publique, mais surtout à mettre en cause la probité d'agents assermentés de l'Etat et d'agents territoriaux au service quotidien de l'intérêt général".

Une question centrale et grave, en effet, quand les riverains et les salariés de l'usine Fertiladour attendent que soient clarifiées les responsabilités des uns et des autres.

De l'industriel contre lequel aucune amende n'a jamais été prononcée, aux "agents assermentés" tenus de respecter comme il se doit l'article 19 de la loi N°2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.

Il en va sans doute de la capacité de l'exécutif aquitain à poursuivre les yeux grand ouverts son ambition d'un "Port de Bayonne exemplaire dans son développement durable".

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